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Canet, le 2005/03/07

mercredi 7 mars 2007, par Michel Balat

Canet, le 7 mars 2005

Au fond, ce qu’à apporté Lacan - je crois que ça vaut le coup d’y revenir régulièrement parce qu’en somme, ça se comprend, ça se lit, il paraît que c’est difficile à lire, mais c’est pas exact. Lacan, ça se lit comme un roman - ce n’est pas une façon de penser naturelle, je veux dire habituelle... reste à savoir qu’est-ce que c’est ce « on pense ».

Je voudrais vous proposer une sorte de formule, et puis la mettre à l’épreuve. La formule serait « il n’est rien qui ne soit produit par le langage ». C’est un aphorisme à examiner, fabriqué pour la circonstance... Ce n’est pas un mode de pensée auquel on a été habitué... il y a le monde, et puis on cause... Il y a cette séparation, ce dualisme qui fait que, au fond de nous, même quand on énonce des aphorismes comme ça, on se dit « malgré tout il y a le concret, cette table... » C’est très difficile de sortir de ça. Depuis le début de l’année, je vous dis que c’est une lutte constante parce que, spontanément, on n’est pas là-dedans...
La première question à se poser c’est : est-ce que c’est soutenable ?... L’idée est la suivante, quelle que soit la chose avec laquelle je suis en contact, une formule est nécessairement là pour soutenir ce que je perçois, même si je ne le dis pas. Si je prends une feuille de papier... le dualiste pourrait me dire « oui, mais vous avez la perception, d’abord vous percevez »... certes, je perçois mais cette perception ne prend que lorsqu’elle est formulée... même si sans doute, on pourra lui faire une place. Ça n’est pas quelque chose qui se donne à moi d’emblée. Le dualiste pourrait reprendre « vous avez raison, je suis toujours amené à formuler en langue toutes les choses que je perçois, mais il n’empêche que ces choses sont là avant que je les ait perçues » Alors à ce moment-là, j’assène au type de façon terrible « mais “avant que” c’est une catégorie grammaticale ça ! », et là, il s’effondre dans un cri... il devrait s’il était raisonnable... il ne peut plus évoquer un monde où il n’y aurait pas le langage parce que pour pouvoir l’évoquer il faut les mots en question. Il me semble que là, le type devrait se rendre immédiatement à mon argument... un argument massif qu’avançait déjà Aristote en son temps...

... Ça se fait encore cette sonnerie... ça m’intéresse, ça, parce que maintenant on ne la trouve plus dans les machines qu’on achète... quel que soit le restaurant où on allait, dès que ça sonnait, tout le monde se jetait sur son portable parce que tout le monde avait la même... il y a tout un langage là-dedans maintenant... Nous on pourrait dire « c’est un contre-exemple puisque c’est tout à fait spontané ». Il n’empêche que, précisément, c’est travaillé de façon extraordinaire par le langage... par les signes. Ça fonctionne comme ça parce que c’est un signe ; une perception ne suffirait pas...