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Canet, le 21 mai 2007 Le « Simplexe » mère-enfant et les tessères corporelles.
lundi 21 mai 2007, par
Canet, le 21 mai 2007
Le « Simplexe » mère-enfant et les tessères corporelles.
M. B. : Et voilà, bon, nous sommes le…
Public : Le 21 mai…
M. B. : Le 21 mai 2007. Bon, aujourd’hui je me disais que ça vaudrait le coup de continuer sur ces histoires non seulement du mot d’ordre, ce qui est un peu monomaniaque, mais aussi et surtout du token, des tessères, parce que je crois qu’il y a là quelque chose d’important à gratter.
Sur les tessères, je reprends ce que je vous disais la dernière fois, en essayant d’aller un petit peu plus loin. Comme vous savez, les choses les plus théoriques touchent au plus concret. Quand les concepts sont bien affûtés, ils touchent au concret. La tessère pose un problème sur le plan théorique, à savoir le fait que la tessère n’est pas un morceau de chair. C’est un réel embarras que nous allons tenter de préciser. Mais parler de la nature de l’embarras, ça veut dire qu’on a déjà les moyens d’en sortir.
Si vous voulez, puisque la tessère participe à la fois du matériel et de la secondéité — elle appartient à la classe du sinsigne ou de la trace, donc à quelque chose de perceptible —, et puisqu’elle montre des types quand on l’observe, et que par conséquent elle n’appartient totalement ni au registre de la secondéité ni à celui de la matérialité, cette complexité nous autorise à la considérer comme quelque chose de fondateur : il y a des choses dans le monde qui, immédiatement, sont perçues comme des types. Voilà l’idée de la tessère.
Évidemment, la première approche est celle de Peirce : la tessère c’est ce truc bizarre qui est une réplique. C’est intéressant, les répliques, parce que le terme est emprunté à Platon : tout ce qui est la matérialisation de l’idée en est une réplique imparfaite. Quand on reprend cette question-là, on peut dire que ces répliques doivent être liées à un certain nombre de contraintes sur le plan formel : si l’on veut pouvoir lire le a, on ne doit pas le dessiner n’importe comment, un certain nombre de contraintes de formes qui sont les contraintes fondamentales imposées par la typicité : le fait que ce soit un type impose aux répliques d’avoir un certain nombre de formes définies. Au fond, c’est là qu’on voit que la matérialité est une nécessité, mais cette nécessité se limite à contraindre la perception : au bout du compte, la tessère incorpore un certain nombre de formes, de qualités, d’icônes, voire même de tons, c’est une certaine composition de tons finalement. On peut avoir cette idée-là avec les suites de Bach par exemple, où l’on a une alternance de formes musicales particulières : ça ne peut pas être n’importe quoi. Quand vous prenez une fugue, eh bien, ça a aussi des formes particulières, il faut qu’il y ait deux thèmes ou trois thèmes, etc., enfin bon, c’est tout un système ; quand vous prenez une sonate, c’est organisé aussi d’une certaine façon, vous avez donc ces formes qui sont des formes typiques.
Je pense beaucoup à quelqu’un qui m’a épaté à un moment donné, enfin il ne m’épate plus parce qu’il est mort, et dont j’ai parlé souvent, un nommé Stephen J. Gould. Vous connaissez Stephen J. Gould ? C’est un type épatant, un grand biologique américain, qui a écrit entre autres Le pouce du panda, enfin des livres extraordinaires où il étudie de très près la question de la théorie de l’évolution. Et il faisait remarquer une chose bigrement intéressante… dans le monde végétal par exemple, on sait depuis Linné que quand on classifie les espèces il y a un certain nombre de types qui peuvent être très semblables et appartenir en fait à des espèces différentes, par contre, à l’inverse, mais ça c’est plus commun, on peut avoir des choses extrêmement différentes qui appartiennent à la même espèce.
Si l’on prend les mammifères, certains vivent dans l’eau, d’autres sur terre. C’est la fameuse confusion sur la baleine par exemple, qui est un mammifère alors que ça se présente tout à fait comme un poisson. Toutes ces choses-là sont importantes à noter. On pourrait alors dire qu’il y a là une sorte de raison qui est à l’oeuvre, mais on peut se demander si cette raison est raisonnable, réelle… C’est là que je place ma phrase magique, une des rares phrases que je retiens depuis mon enfance, enfin depuis mes seize ans ou mes dix sept ans : « La larve trochophore des annélides polychètes — les annélides polychètes c’est très joli comme nom, mais c’est le ténia —, la larve trochophore des annélides polychètes ressemble à la larve véligère des mollusques lamellibranches ». Autrement dit la larve du ténia ressemble à celle de la moule, et ça, c’est frappant, d’où ça vient ces ressemblances ? On voit bien là que la question des ressemblances et des dissemblances vient se heurter à la question des espèces, des familles, etc., et on se dit : mais est-ce que finalement ce heurt est un heurt de raison ? Quel est son niveau de réalité ?
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Messages
1. Canet, le 2007/05/21, 11 janvier 2008, 12:13, par Sylvain Boursier
Bonjour,
Je découvre votre site, votre travail sur les liens entre psychanalyse, sémiotique et logique. Connaissez-vous les écrits du hongrois Imre Hermann, collaborateur de Ferenczi ? Il a essayé de penser des parallèles entre la psychanalyse, la logique et la géométrie non euclidienne de Riemann et Lobatchevski.
Cordialement
1. Canet, le 2007/05/21, 11 janvier 2008, 18:31, par Michel Balat
Je connais Hermann, mais je ne savais pas ses réflexions sur la géométrie. Merci pour votre message. MB