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Canet, le 26 septembre 2005 Etude du fantasme comme articulation de l’Imaginaire au monde.
lundi 26 septembre 2005, par
Canet, le 26 septembre 2005
Etude du fantasme comme articulation de l’Imaginaire au monde.
Oui, Fabien a envoyé un mail pour redire que les causeries s’adressaient maintenant beaucoup plus aux psy, et qu’il se sentait donc moins impliqué. Cela le faisait moins rêver et du même coup il préférait ne plus venir, voilà. On le regrettera beaucoup.
Avant de reprendre les fantasmes originaires je me disais qu’il serait peut-être utile de reprendre une question que nous avions abordée lors de la causerie du 19 septembre et qui, à mon sens, légitime ce que j’ai raconté l’année dernière : le fait d’utiliser les fantasmes en leur attribuant comme fonction d’installer les connecteurs logiques.
Je ne sais pas si l’on a examiné le fantasme avec suffisamment d’attention lundi dernier. Il me semble que parfois on fasse comme si les fantasmes étaient évidents, mais ce sont de drôles d’objets qui se manifestent à nous… on pourrait interroger leur nature en général comme leur fonction… Vous savez que la nécessité de l’écrire avec ph ou avec un f est un débat de vieille date. Des propositions très précises consistent par exemple à réserver le ph au fantasme inconscient et le f au fantasme conscient. Il me semble que ce n’est pas utile. J’ai moi aussi hésité longtemps, mais un fantasme orthographié avec ph ou f reste un fantasme.
L’idée consiste évidemment à donner aux fantasmes inconscients une place tout à fait particulière. Il reste qu’il n’est pas nécessaire de distinguer des fantasmes conscients ou inconscients qui remplissent, d’une façon ou d’une autre, la même fonction, selon un artifice orthographique qui, de plus, n’est pas même sensible à l’oreille.
L’idée que nous avons balayée l’année dernière avec toutes sortes de balais, des gros à crin et des balayettes plus fines, était celle de la réalité. Dans le sens commun du terme, le fantasme est ce qui se distingue de la réalité. Or, d’après ce que nous avons observé et détaillé avec un grand nombre d’outils très lourds, de telle sorte que toute la philosophie du monde nous est alors tombée sur le râble, une telle distinction ne pouvait être patente puisque, la réalité étant psychique, le fantasme est partie intégrante de la réalité. Le fantasme a donc une certaine fonction dans l’économie psychique et celle-ci ne consiste pas à fabriquer un monde qu’on appellerait à tort imaginaire par rapport au monde réel et bien réel dont on dispose, puisqu’en dernière analyse nous avons pu dire, là aussi, que la réalité c’est pratiquement l’imaginaire. Dans son essence la réalité est l’imaginaire, avec cette idée toute simple qu’il est nécessaire que notre esprit porte le monde, sans quoi l’on ne pourrait pas avancer. Si je ne m’attendais pas à trouver la table ici, jamais je ne me reposerais dessus, ce qui signifie que le monde est parfaitement constitué dans mon imaginaire.
Bon, évidemment il ne faut pas confondre l’imaginaire avec le privé. L’imaginaire est public, c’est quelque chose qu’on partage, sur quoi on s’accorde avec nos contemporains, parfois des inepties. Quand j’étais gamin, j’étais un fanatique de la mythologie grecque, et mes livres de chevet étaient des éditions abrégées de l’Iliade et de l’Odyssée — je n’ai lu les éditions intégrales, les vraies, que beaucoup plus tard. Je me souviendrai toujours du duel de Pâris et de Ménélas, et de l’intervention d’Aphrodite. Je voyais Pâris lutter comme une bête au milieu de la poussière, du sang, des larmes et des cris, je voyais Aphrodite le voiler « d’un brouillard épais », puis l’enlever, avant de le ramener sur le Mont Œta, et je me disais : « Mais ils y croyaient ! ». S’ils n’y avaient pas cru, ç’aurait été absurde ; ils y croyaient, donc il était nécessaire que les dieux interviennent réellement. Tout bien considéré, même l’église catholique demande que les miracles soient confirmés.