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Canet, le 28 janvier 2008
lundi 28 janvier 2008, par
Canet, le 28 01 2008
M. B. : Nous sommes le 28 janvier 2008. Vous avez le bonjour de la jeune psychologue qui venait là qui allait à Toulouse.
Public : Fabienne Chiroleux.
M. B. : Voilà, Fabienne Chiroleux qui est dans un pays impossible, enfin impossible, n’exagérons rien…
Public : On dit improbable.
M. B. : Improbable, voilà, allez, improbable. Alors il faut que je vous dise que le dernier séminaire de Lacan publié au Seuil, c’est D’un discours qui ne serait pas du semblant . Un grand séminaire. Ce n’est pas qu’il y ait des grands et des petits, chacun apporte son lot, mais celui-là est particulièrement riche. Et puis il y a le livre dont je ne vous ai pas parlé la dernière fois, mais que je vous le signale parce que, vraiment, ça vaut le coup de le lire, Tout ne se joue pas avant trois ans de notre ami Pierre Delion.
T. M. : Qu’on trouvera le 9 février aux « Journées avec… ».
M. B : Qu’on trouvera le 9 février, en de multiples exemplaires : je pense qu’on va se l’arracher, parce qu’il est formidable. Il a vraiment réussi son bouquin, c’est magnifique. Le corps du livre est pris en sandwich entre disons deux chapitres, qui sont beaucoup plus politiques, polémiques, etc. Il y mène une polémique douce. Et tout le centre est consacré au développement de l’enfant, au soin en institution, etc. Très simple, direct, vivant, enfin c’est magnifique, donc si vous le voulez, vous l’aurez le 9, mais vous pouvez l’avoir avant.
T. M. : Pas avant le 6.
M . B. : Ah ! pas avant le 6.
T. M. : Eh oui, il sort le 6.
G. P. : Il paraît le 6.
M. B. : Donc très bien. Bon, ce n’est pas simple, ce dans quoi nous sommes engagés ici.
G. P. : Maintenant que tu me le dis…
M. B. : Oui (rires). La dernière fois j’avais introduit la notion de la concaténation, et je vous avais fait remarquer que tout le système des tessères qui supportent la concaténation, c’est un système qu’il nous faut considérer comme directement interprétant, et j’avais repris à cette occasion les histoires de représentement, interprétant, ou scribe, interprète, avec le museur au milieu qui vient donner du sens à l’ensemble. Je vous rappelle aussi, mais enfin je le redis, que si on reprend la manière dont Peirce aborde de la façon la plus large la question du signe, je vous rappelle qu’il l’énonce, le signe, comme une relation triadique entre trois sujets, — ne prenez pas ça au sens du sujet de Lacan —, dont le premier est le représentement, le deuxième sujet l’objet, et le troisième sujet l’interprétant. Cette relation triadique fonctionne intérieurement de la manière suivante à savoir que l’interprétant devient un représentement du même sujet pour un autre interprétant, c’est-à-dire c’est ce qui, en quelque sorte, marque la place de l’interprétant ; l’interprétant, en tant qu’interprétant, est d’abord un représentement du même objet pour un autre interprétant, qui va être lui-même un représentement du même objet pour un autre interprétant, voilà. C’est le développement de ce que Peirce appelle la sémiose, un processus qui n’est pas destiné à être limité, théoriquement. En effet, si jamais à un moment donné un interprétant achevait le processus du signe, il ne serait plus un représentement du même objet pour un autre interprétant, de telle manière que, théoriquement, ça ne doit pas s’arrêter. Bon, devant ça, on peut se dire qu’alors c’est fichu puisque jamais on ne pourra avoir l’interprétation d’un signe. S’il faut toujours dire, eh bien, oui, chaque fois, il faut aller un peu plus loin, allez plus loin, encore, c’est terrible. Ceci ne peut avoir de sens véritable que si on suppose, — je vous renvoie aux quelques années précédentes, —que si on considère que ce processus est continu, et que la description qui en est donnée, la description théorique, structurelle, ne mène pas à une aporie. Car cette dimension de continuité peut résoudre la question en considérant le paradoxe de Zénon, dont je vous avais déjà expliqué l’histoire. Achille et la tortue est la description du mécanisme. Achille doit toujours passer par la place qu’avait occupée la tortue lorsque lui-même était derrière elle. C’est en saisissant ce mécanisme qu’on se rend compte qu’effectivement il peut y avoir interprétation même s’il y a une infinité d’interprétants, mobilisés en tout cas. Voilà, ça c’est un point qui est très important, d’où, dans les réflexions précédentes, j’avais déduit qu’il y avait là tout un rapport entre la continuité du processus et la discontinuité de ce qui est décrit, théorisé, pensé du dit processus. Les interprétants, au sens discontinu de « chaque » interprétant, peuvent introduire des discontinuités lorsqu’on saisit les points comme les pas d’Achille. Mais cette discontinuité est dans un continuum. Dès lors, nous sommes amenés à considérer qu’en fait, de même que chaque pas d’Achille n’est pas « marqué », « chaque » interprétant n’est pas marqué, n’est pas, pour imager la chose, un point d’arrêt. Alors pourquoi tout ces tracas ?
(…)