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Canet, le 04 février 2008
lundi 4 février 2008, par
Canet, le 04 02 2008
M. B. : D’une fois sur l’autre je me souviens pas de ce que j’ai raconté, et comme personne n’écoute… (rires) nous pouvons être tranquilles. On pourrait se demander à quoi ça sert. Peut-être, sans doute même pour les interstices, pas pour ce que je raconte qui n’a qu’un intérêt limité. Mais parfois, à raconter des conneries, on finit par dire des choses, par hasard.
Public : On a parlé de Jérôme Kerviel.
M. B. : Ah, on a parlé de Jérôme Kerviel ? Oui, à cause de mon fiston.
Public : Le sujet de l’inconscient qui est un représentement mental, moi j’ai noté des trucs…
M. B. : J’ai dit ça ?!
T. M. : La nécessité qu’il y ait des hommes mais pas des sujets.
Public : Qu’il y ait eu un homme ou un corps ?
M. B. : Bon, on peut donc continuer (rires) d’un bon pied.
Public : Il y en a encore à dire…
O. F. : On y revient, chaque semaine.
M. B. : Eh bien oui, c’est pour ça, il doit bien y avoir quelque chose. Ça y est, Laurence est arrivée, on peut commencer
Public : Oui, mais voilà, c’est à partir de ça qu’on a travaillé…
M. B. : Oui, très bien. Les chaises se cassent les unes après les autres, c’est une véritable hécatombe.
Public : Le poids de la pensée.
M. B. : Le poids de la pensée, disons le comme ça (rires), ça fera plaisir à tout le monde.
Je pars, disons, d’une idée vague, que j’essayais d’exprimer en essayant d’y mettre des petites fleurs autour, mais enfin c’est une sorte de sentiment théorique, à savoir que quand l’écriture se met à fonctionner qu’est-ce qu’elle vient révéler de ce qui était déjà là et qui a permis qu’elle se constitue ? Il y a maintenant bien longtemps, j’ai décidé d’élire comme ennemi intime Piaget, lorsque j’ai lu chez lui que lorsque les mathématiciens ont découvert la théorie des groupes, elle était déjà efficiente dans les mathématiques.
Public : Et tu lui reproches ça ?
M. B. : Oui, je lui reproche ça, car lorsqu’est créé un nouveau concept — et la notion de groupe en mathématiques et un authentique concept — il transforme le champ, ouvre de nouvelles possibilités de penser, déchaîne de nouveaux interprétants. Je pense à ce proposa ce que dit Peirce à propos de l’inférence (référez-vous à ce terme dans le livre que nous avons traduit avec Janice Deledalle ) : L’inférence est l’« action de déterminer consciemment le contenu d’une cognition ou des cognitions antérieures, d’une manière qui paraît devoir avancer l’état des connaissances ». Dès lors l’efficience de la conclusion est autre que celle de la prémisse. Piaget eût-il seulement utilisé un futur antérieur, je ne l’aurais pas élu ainsi. Pour avoir son efficience la théorie des groupes doit être énoncée. Sa psychologie génétique me semble viciée logiquement par cette prise de position. (C’est un peu l’histoire du lapin dans le chapeau du prestidigitateur : s’il l’en sort, c’est qu’il y était.) Ça me rappelle une visite dans une maternelle. J’enseignais à ce moment-là les mathématiques aux normaliens, avec mon cher ami Joseph Jaume. Nous étions dans la classe et je propose à une enfant une expérience hautement piagétienne concernant le dénombrement. Je mets sur la table en correspondance bi-univoque deux séries de jetons, 6 rouges et 6 jaunes (à la Piaget, c’est-à-dire chaque jeton jaune sous un jeton rouge). Je demande alors à l’enfant s’il y en a le même nombre et il répond, piagetiennement, oui. Puis j’en mets 8 rouges alignés, et 8 jaunes au-dessous, mais cette fois-ci sans les faire correspondre un à un. Même question à l’enfant. Il me répond, fort peu piagetien cette fois, oui. Je lui demande de justifier son « oui ». C’est alors qu’il me répond « parce qu’il y en a 8 ! » Sans commentaires !
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