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La traumatisé crânien et la faille du sujet (tentative de correction du séminaire, non aboutie)
Exergue : Page 38 de LTI (Victor Klemperer)
mercredi 15 juin 2005, par
(...) combien de fois n’ai-je pas entendu le bruit des cartes à jouer qui claquaient sur la table et les conversations à voix haute au sujet des rations de viande et de tabac et sur le cinéma, tandis que le Führer ou l’un de ses paladins tenaient de prolixes discours, et après on lisait dans les journaux que le peuple tout entier les avait écoutés attentivement. Non, l’effet le plus puissant ne fut pas produit par des discours isolés, ni par des articles ou des tracts, ni par des affiches ou des drapeaux, il ne fut obtenu par rien de ce qu’on était forcé d’enregistrer par la pensée ou la perception. Le nazisme s’insinua dans la chair et le sang du grand nombre à travers des expressions isolées, des tournures, des formes syntaxiques qui s’imposaient à des millions d’exemplaires et qui furent adoptées de façon mécanique et inconsciente. On a coutume de prendre ce distique de Schiller, qui parle de la « langue cultivée qui poétise et pense à ta place », dans un sens purement esthétique et, pour ainsi dire, anodin. Un vers réussi, dans une « langue cultivée », ne prouve en rien la force poétique de celui qui l’a trouvé ; il n’est pas si difficile, dans une langue éminemment cultivée, de se donner l’air d’un poète et d’un penseur. Mais la langue ne se contente pas de poétiser et de penser à ma place, elle dirige aussi mes sentiments, elle régit tout mon être moral d’autant plus naturellement que je m’en remets inconsciemment à elle.