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Lopez Ibor Juan Jose : La angustia vital/L’angoisse vitale

Traduction de Sylvie et Serge Arbiol

dimanche 13 mai 2007, par Michel Balat

L’angoisse vitale

Juan José Lopez Ibor

Il y a quelques années j’ai publié un ouvrage portant ce titre. Le qualificatif « vitale » avait, dans ce livre, une signification précise. Je faisais référence à l’angoisse d’origine interne, endothymique, non produite - quoique parfois déclenchée - par les événements de la vie. L’expression « angoisse vitale » est passée dans le langage courant et il est d’usage de la comprendre comme l’angoisse que produisent les événements de la vie, c’est-à-dire cet état de préoccupation qui appartient à la vie quotidienne et qui semble à présent exacerbé ou, tout au moins, devient plus évident pour l’homme moyen.
L’angoisse est le grand thème de la philosophie et de la littérature contemporaine. L’existence humaine se déroule entre la naissance et la mort. Ce sont ses limites naturelles et irrévocables. Vue sous cet angle, l’existence est comme un faisceau lumineux qui se découpe sur le néant. Cet être enveloppé par le néant constitue l’expérience fondamentale de l’existence humaine. Cela s’appelle l’angoisse. Lors des consultations dans les hôpitaux nous accueillons les malades. Ce sont bien souvent des personnes simples, dont les capacités d’introspection sont limitées et la connaissance des problèmes ontologiques et métaphysiques nulle.
Les malades parlent, parfois, d’angoisse et d’autres fois de peur. Très souvent ils n’emploient aucun de ces deux mots, mais décrivent d’autres sensations ou malaises. Le mot malaise est celui qui convient le mieux ici. Malaise, mal-être. Leur être- dans -la -vie a changé. La philosophie existentielle parle de l’être dans le monde. En espagnol, il existe deux termes “ser” et “estar”. Ce dernier possède une signification concrète et bien définie qui dans d’autres langues se trouve absorbée par le mot “être”. Dans « l’anthropologie compréhensive » de Zutt, on parle du Stand en tant que caractéristique fondamentale de l’existence humaine. Sa signification présente une certaine analogie avec le (verbe) « estar » de la langue espagnole. On est dans le monde, dans la vie, d’une manière concrète, sous laquelle on apparaît. On est bien ou mal. On est malade. On est joyeux ou triste. On est angoissé. On est affligé ou de mauvaise humeur. Ce sont des variantes de la façon de se sentir (mot à mot “se trouver”) dans le monde. Non dans le monde en tant que réalité objective, mais en tant que réalité vitale.
L’angoisse est le noyau fondamental des névroses. L’angoisse qu’éprouvent les névrosés a-t-elle quelque chose à voir avec celle de la philosophie existentielle ? Jusqu’à quel point pouvons-nous dire que l’angoisse du névrosé est angoisse face au néant, sans trahir, par cette formule, la réalité ?

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