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Noana

Dr Jean-Claude Jouhet Psychothérapie “ D ” CHRU de TOURS

mardi 28 février 2006, par Michel Balat

Noana

Ma première rencontre avec Noana, s’est faite un soir de garde de 2004, au service des urgences de l’hôpital. Elle avait alors 17 ans et demi.

Elle venait d’inquiéter suffisamment son médecin de la clinique institutionnelle de S., où elle se trouvait admise depuis trois semaines, pour qu’il me l’adresse. Depuis une semaine, elle refusait de s’alimenter, on l’avait rattrapée sur une route, elle avait menacé de se jeter du haut d’un escalier.

J’avais entendu parler d’elle quelques semaines plus tôt.

Marcel, médecin responsable de l’unité intersectorielle des adolescents, m’avait adressé un courrier, résumant son histoire, dans le dessein de préparer un transfert en direction de notre service d’adultes, dans l’hypothèse d’un échec de la prise en charge à la clinique où il l’orientait. Aucune rencontre entre nos équipes n’avait encore eu lieu.

Alors que Noana quittait S. du fait de son passage à l’acte, un autre passage à l’acte se dessinait, celui de devoir l’admettre à 23 heures dans le service où je travaille, l’unité d’adolescent n’ayant aucune place disponible pour la réadmettre et refusant quoiqu’il en soit de la reprendre. Le courrier la concernant, dont j’avais été destinataire, évoquait en particulier à son sujet « une véritable dépendance à l’institution psychiatrique pour laquelle nous nous sommes sentis impuissants », il insistait sur le fait que la jeune patiente « qui renouvelle son refus de vivre en milieu normal, jugeant que sa place est en psychiatrie », avait « largement dépassé les limites de ce qu’on pouvait lui proposer » , « puisque les séjours dans le service d’ados ne dépassait généralement guère trois semaines » et que Noana s’y trouvait depuis 18 mois....

Nous avons heureusement trouvé ce soir-là une possibilité d’accueil temporaire dans un service qui la connaissait déjà, ce qui nous laissait du temps pour organiser le relais de cette prise en charge. On sait combien trop souvent, dans ces circonstances, et dans la situation catastrophique où se trouvent les possibilités d’admission dans les secteurs, la période de préparation à l’accueil se trouve escamotée. Or, en la circonstance, l’affaire réclamait du temps.

Nous pûmes nous rencontrer dans les 48 heures, une bonne partie de l’équipe du pavillon était là, une infirmière de l’unité des adolescents et le médecin nous parlèrent de leurs trois ans de prise en charge. Un courrier fut adressé à Noana, qui fut accompagnée et reçue quelques jours plus tard par l’équipe du pavillon qui allait l’accueillir, elle y fut admise dans les jours suivants.

Voilà ce qu’on nous rapporta...Noana avait vécu dans un orphelinat de Roumanie.