Accueil > Les entours > Charles S. Peirce > Peirce : New Elements
Peirce : New Elements
Charles S. Peirce
jeudi 16 juin 2005, par
Je me permets d’offrir une critique du style mathématique en logique. Je dis en « logique », car les mathématiciens n’emploient le style euclidien que pour présenter la logique du sujet. Quand ils ne font que chercher une solution à des problèmes difficiles ils oublient tout à son propos. J’appelle ce style euclidien car le premier livre des Eléments d’Euclide en est le plus ancien et le modèle le plus parfait. Euclide le maintient, dans une certaine mesure, dans ses autres écrits ; mais ce n’est que dans le premier livre des Eléments qu’il est poli par un travail et une pensée infinis. Il est aisé de voir que ce style prend son origine dans le goût esthétique des Grecs. Tout ce qu’ils ont fait, en littérature et en art, montre une prééminence de leur horreur du « trop ». Peut-être cette horreur était-elle due à l’irrépressible activité des esprits grecs, et par suite à leur agacement devant les considérations inutiles, et la cherté, dans ces temps d’énergie de tout type, des processus mécaniques d’écriture et de lecture. Ils assumaient que le lecteur penserait activement ; et les phrases de l’écrivain devaient simplement servir d’autant de marques lui permettant de suivre la trace de la pensée de l’écrivain. Le livre moderne doit être approuvé par une jeune femme profondément stupide et indiciblement indolente tournant ses pages tout en regardant par la fenêtre pour être admirée. Pour mettre une idée sous une forme telle qu’elle ne puisse éviter de la saisir, il est d’abord requis qu’elle remplisse un certain nombre de lignes, et ensuite que le moindre pas ne soit laissé à sa propre activité intellectuelle.