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« Politique ta mère » ou Le destin de Jennifer

par une non-Zuppienne mal identifiée : Françoise-Ginette-Jennifer PIERENS

mercredi 4 mars 2009, par Michel Balat

« Politique ta mère »

ou

Le destin de Jennifer

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« Ne dis jamais ça à ton père......!!!!!! »

Agée de 4 ans, prénommée Jennifer, je fréquentais l’école d’une ZUP en 1984. En raison de la carte scolaire, cette école accueillait quelques enfants « gauche-caviar ». Les autres parents « non-zuppiens » avaient trouvé plus sécurisant, pour l’avenir de leurs enfants, de les scolariser dans les écoles privées du centre-ville.

Entre beaucoup de Jennifer, Jessica, Cindy, Mickaël, Johnny et Kévin, on pouvait découvrir quelques Charlotte, Clémence, Charles et Edouard.

En 1981, la France s’était émue de graves incidents survenus à Vénissieux près de Lyon, et le gouvernement ne pouvait rester muet devant l’ampleur médiatique des évènements. Ne rien faire et ne rien dire auraient compromis les élections à venir. Alors le Premier Ministre de la France décida qu’il fallait faire semblant de faire quelque chose. Il réunit une savante commission dont aucun des membres n’avait jamais habité une HLM, et décida d’apporter de l’argent à 23 quartiers prioritaires ( c’est à dire 23 quartiers de misère ). On appela cela le DSQ .............entendez par là « Développement Social des Quartiers ».

Puis en 1982, le Ministre de l’Education Nationale décida de la création des ZEP ( Zone d’Education Prioritaire ).

J’avais 4 ans, j’habitais une ZUP, dans un des 23 quartiers DSQ, et mon école était classée ZEP.

J’avais beaucoup de difficultés à parler parce que ma mère n’avait jamais le temps, ni de m’entendre, ni de répondre. Et puis dans l’appartement, il y avait beaucoup de bruits d’enfants, de grandes personnes connues et inconnues, et j’avais vite compris qu’il ne servait à rien de parler et encore moins de poser des questions.

Parmi les cris, je percevais à intervalles réguliers ceux d’un nouveau bébé. J’avais remarqué qu’environ une fois par an, maman s’absentait quelques jours de l’appartement, et qu’elle revenait chaque fois avec un marmot hurlant.

Les jours qui suivaient, il y avait un défilé incessant de gens connus ou pas, venus trinquer à la santé du nouveau bébé.........Personne ne le regardait, ni lui, ni moi, ni tous les autres enfants, mais il n’y avait jamais assez de verres propres pour chacun. Et chaque matin, c’était très fatigant d’aller à « super-machin » pour acheter de nouvelles bouteilles.

J’avais aussi remarqué que pendant les quelques semaines qui suivaient l’arrivée du nouveau bébé, maman ne se plaignait pas de l’argent qui manque. Elle se montrait même très généreuse en gâteaux , bonbons, et coca-bidules....à croire qu’il suffisait d’un nouveau bébé pour acheter tout ce que l’on voulait. Une expression magique résonne encore dans ma tête « Prime de naissance ».

(…)