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Sur la fonction d’accueil

Pascal Crète

mercredi 3 mai 2006, par Michel Balat

« Sur la fonction d’accueil »

Je voudrais tout d’abord remercier Pierre DELION de nous avoir conviés à cette journée mais surtout d’avoir réussi à franchir le pas en introduisant les questions de la psychothérapie institutionnelle à l’université. S’il est vrai que « la psychothérapie institutionnelle en soi cela n’existe pas », qu’on ne peut la situer du côté d’une science, qu’il n’y a pas une méthodologie appliquée, il n’empêche que ce mouvement, cette manière d’être et de se positionner dans le travail qui est le notre a, depuis quelques décennies, montré la pertinence de son intérêt, notamment dans le champ de la clinique des psychoses. Faire se rencontrer la psychothérapie institutionnelle et l’université est un étonnant mélange, peut-être explosif, pour le moins paradoxal puisque dans un lieu où la question de la science et du savoir semblent établis, nous allons parler de questions qui ne peuvent être vraiment saisies, qui nous échappent sans cesse, qui nous amènent à formuler des hypothèses, notamment celle essentielle du désir inconscient, rien que des hypothèses que le travail quotidien viendra valider ou non dans l’après-coup. Cette rencontre est bien celle du savoir de la science et de celui de l’inconscient.

[Note : Si je me réfère à la typologie des quatre discours proposés par LACAN, l’agent du discours de l’analyste est bien l’objet a, c’est-à-dire le désir inconscient, et ce qui est produit par cette matrice est du S1, c’est-à-dire du signifiant maître et donc possiblement de la structure ; alors que l’agent du discours universitaire est S2, c’est-à-dire le savoir, et ce qui résulte de l’opération, c’est du $, sujet barré de l’inconscient. Cette typologie est une boite à outils pour définir différents types d’ambiance, de semblants et il est manifeste que l’ambiance produite pas le discours analytique et celle produite pas le discours universitaire n’est pas du même ordre.]

Mais comme Pierre DELION est une personne extrêmement intelligente et futée, il n’a pas proposé un enseignement classique sur la psychothérapie institutionnelle, pas de DSM de PI devant vous ; il a ouvert ce lieu aux associations culturelles en santé mentale et à des personnes de terrain qui peuvent témoigner de leur praxis. Témoigner de ce que l’on fait est un exercice difficile mais indispensable pour repérer ce qui, dans notre pratique quotidienne est efficace, ce qui soigne, ce qui soulage de la souffrance. J’espère que nous saurons tout au long de cette journée vous faire partager nos expériences, aussi nos questions et qu’ensemble nous allons construire un dispositif collectif d’élaboration sur l’accueil.

Le paradoxe de ce Diplôme Universitaire est d’autant plus fort que la psychiatrie va mal, je ne vous apprends rien en énonçant cela. Que ce soit dans le secteur sanitaire comme dans le secteur médicosocial, ce qui est de l’ordre du tissu institutionnel semble se déconstruire, voire se décomposer, alors que ce qui relève de la logique de l’établissement se rigidifie. Pourtant ce DU existe et dès la première année, vous êtes nombreux à y venir certainement dans cet esprit qui nous anime de résister et de continuer de construire, malgré tout, des outils pour soigner, éduquer, enseigner.
Le mois dernier, au séminaire d’OURY à Ste-Anne l’amphi était comble, des gens jeunes étaient assis dans les allées centrales, cela donnait l’impression d’une AG ou d’une conférence de LACAN. A Caen, l’association culturelle le CRIC accueille plus de vingt établissements et services différents chaque mois ; même si le contexte général est catastrophique, que l’on revient à des pratiques du début du siècle, que la misère et la folie cheminent à nouveau l’une à côté de l’autre, malgré tout cela, un mouvement est en train de prendre forme et je pense sincèrement que les années à venir seront certes difficiles mais aussi riches car nous allons devoir nous réunir pour nous défendre. Mais pour se réunir, il faut des rassembleurs, des gens qui tiennent bon contre « vents et marées ». Nous savons que Pierre DELION est de ces gens, comme Jean OURY, François TOSQUELLES, Horace TORRUBIA, Hélène CHAIGNEAU et les autres.

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